Le prisonnier politique le plus célèbre d’Egypte, Alaa Abdel Fattah, en grève de la faim et qui selon ses partisans n’avait plus que quelques jours à vivre, s’est invité lundi 7 novembre aux discussions des dirigeants réunis à Charm el-Cheikh pour la COP27. Le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi a donc dû répondre successivement au Premier ministre britannique Rishi Sunak et au président français Emmanuel Macron au sujet du prisonnier anglo-égyptien, icône de la révolution de 2011 en Égypte. M. Sunak avait prévenu : Alaa Abdel Fattah est une « priorité » pour Londres. Lundi soir, après avoir rencontré le président égyptien, il a déclaré qu’il “espère voir son cas résolu le plus rapidement possible” et s’est engagé à continuer “de faire pression pour que des progrès soient faits”, selon un porte-parole de Downing Street. M. Macron a assuré que M. Sissi était “engagé” pour que la santé d’Alaa Abdel Fattah soit “préservée”, disant espérer “que les prochaines semaines et les prochains mois nous permettront d’obtenir des résultats”. . Le porte-parole de M. Sissi s’est contenté d’évoquer ces conversations sans en divulguer le contenu. Le chef de la diplomatie égyptienne, Sameh Choukri, président de la COP27, a assuré à la télévision CNBC qu’Alaa Abdel Fattah “reçoit tous les soins nécessaires en prison”. Autant de revendications rejetées par les proches de M. Abdel Fattah, dont sa sœur Sanaa Seif, présente à Charm el-Cheikh où il multiplie les rencontres avec les responsables et les interviews. Lire aussi : L’article est destiné à nos abonnés A la COP27, l’ombre persistante d’Alaa Abd El-Fattah, célèbre prisonnier politique égyptien en grève de la faim

“Danger de mort”

Depuis le 2 avril, Alaa Abdel Fattah, le chouchou du président Sissi, n’avale qu’un verre de thé et une cuillerée de miel par jour dans sa prison de Wadi Natrun, au nord-ouest du Caire. Emprisonné à plusieurs reprises depuis 2006, il a totalement cessé de manger et de boire dimanche en ouvrant la COP27 à Sharm El Sheikh, à l’autre bout du pays. Lundi, trois journalistes égyptiens ont annoncé qu’ils entamaient une grève de la faim pour exiger sa libération. “Nous arrêtons de nous manger maintenant car Alaa Abdel Fattah est en danger de mort”, a expliqué Mona Selim, lors d’un sit-in de protestation au Caire avec Eman Ouf et Racha Azab. Ils exigent “la libération de tous les prisonniers d’opinion”, qui sont plus de 60 000 en Egypte, selon des ONG. Les militants présents à la COP27 multiplient les posts sous le hashtag #FreeAlaa sur les réseaux sociaux et plusieurs intervenants de la société civile ont terminé leurs discours par la phrase Vous n’avez pas encore été misé. vaincu”), le titre du livre d’Alaa Abdel Fattah. “Il n’y a pas beaucoup de temps, soixante-douze heures au mieux, pour libérer Alaa Abdel Fattah. Si [les autorités égyptiennes] ne le faites pas, cette mort sera dans toutes les discussions de la COP27 », a prévenu dimanche la secrétaire générale d’Amnesty International, Agnès Callamard. A Beyrouth, une centaine de personnes ont manifesté lundi devant l’ambassade britannique : “Il incarne la lutte du monde arabe contre les régimes autoritaires depuis douze ans”, a déclaré la journaliste et militante Diana Moukaled, qui brandissait un portrait en noir et blanc de l’activiste. , accompagné du hashtag #FreeAlaa.

“Symbole de l’arbitraire du régime”

Abdel Fattah, ingénieur de formation et blogueur pro-démocratie qui a participé pendant des années à tous les soulèvements en Égypte, a été condamné fin 2021 à cinq ans de prison pour « diffusion de fausses informations ». Il a été un leader du mouvement politique Kefaya dans les années 2000, suite à la révolution de 2011 qui a renversé Hosni Moubarak, les marches monstres contre l’islamiste Mohamed Morsi deux ans plus tard et la fin des manifestations contre Abdel Fattah Al Sisi. De sa prison, il est devenu “le symbole de l’arbitraire du régime”, raconte Agnès Callamard. Selon Amnesty, depuis que l’Égypte a réactivé la Commission présidentielle de planification en avril, 766 prisonniers d’opinion ont été libérés. Mais 1.540 autres ont été emprisonnés, dont Sherif Al-Roubi, figure de gauche, qui a été réincarcéré après avoir profité de cette grâce, note l’ONG. “Le président avait annoncé une initiative qui allait mettre fin à l’incarcération pour délit d’opinion, mais en réalité c’est le contraire”, ajoute Mme Selim. Lire aussi : L’article destiné à nos abonnés COP27 en Egypte : le sommet sur le climat, une aubaine pour le pouvoir d’Abdel Fattah Al-Sissi
Bien que sa Constitution garantisse la liberté de la presse, l’Egypte compte une trentaine de journalistes emprisonnés. Selon Reporters sans frontières (RSF), Le Caire est 168e sur 180 dans son classement 2022 de la liberté de la presse. Le premier séjour en prison d’Alaa Abdel Fattah remonte à 2006, sous Hosni Moubarak. Il y est retourné sous le maréchal Mohamed Tadawi, chef de facto du pays entre 2011 et 2012, sous Morsi puis sous le président Sissi à partir de 2019. Il est devenu citoyen britannique depuis sa cellule, au milieu d’une grève de la faim. mère, Laila Soueif qui est née à Londres. Lire aussi : La COP27 ne doit pas cacher la nature du régime d’Al-Sissi
Le monde avec l’AFP