Continuez à diaboliser
“Je dois tout à Marine Le Pen.” Lors de son allocution devant le Congrès samedi, Jordan Bardella a rendu un hommage très chaleureux à l’ancien candidat à la présidentielle. Il n’est pas surprenant de voir l’eurodéputée défendre la stratégie de « diabolisation », entreprise par Marine Le Pen, à la tête du mouvement depuis 2011. « La ligne de Marine Le Pen, c’est Jordan qui l’incarne le mieux. Au cours de sa présidence par intérim, il a mené avec succès notre campagne législative. Nous allons continuer notre évolution avec lui, notre transformation pour gagner en 2027″, assure Gilles Pennelle, directeur général du mouvement. Mais ces derniers jours ont montré que la “normalisation” reste un défi de taille pour le parti de la flamme. Vendredi, un député RN a été exclu de l’Assemblée nationale, à la suite de propos jugés “racistes” par toutes les autres formations. Samedi, nouvelle polémique en milieu de conférence : Steve Briois, maire d’Hénin-Beaumont, a accusé le nouveau président RN de procéder à une “purge” au sein du mouvement après son exclusion du nouvel exécutif. Cet ami proche de Marine Le Pen a dénoncé un “risque de re-radicalisation” du parti et dit craindre de voir à nouveau “des fous identitaires décoller” avec l’arrivée au pouvoir de Bardela.
Élever une nouvelle génération
Lors de la campagne interne, Jordan Bardella a promis de former une nouvelle génération de responsables politiques au sein du RN, notamment la création d’une “école des cadres”, dirigée par le politologue Jérôme Sainte-Marie. Le nouveau patron du parti tiendra également une conférence de presse ce mercredi pour présenter les nouveaux principes et l’organisation du mouvement. « Sa mission sera de structurer le parti et son implantation sur le territoire, de préparer le RN de demain avec cette volonté de mettre en lumière de nouvelles personnalités », précise Gilles Pennelle. “La victoire de Bardela a une charge symbolique. Celle de l’arrivée de la génération Marine, plus jeune et souvent sans véritable ancrage territorial, et qui n’aurait peut-être pas rejoint le Front national de Jean-Marie Le Pen”, assure Jean-Yves Camus, politologue spécialiste de “l’extrême à droite”. Lors de la conférence du RN ce samedi, plusieurs militants ont également vu leur nouveau patron comme capable de mobiliser plus largement. “Il est un symbole pour beaucoup de jeunes. Ça peut aider à élargir encore notre base électorale, à faire venir des gens de LR, qui hésitent encore à nous rejoindre”, a déclaré David Tréca, partisan de Louis Aliot et de la Côte-d’Or.
Assainir les finances du parti
Parmi la jeune garde promue au bureau exécutif, centre de décision du parti, figure le député mosellan Kévin Pfeffer, également trésorier national du mouvement. Un poste clé alors que les finances du parti, grevées par un prêt russe, sont dans le rouge depuis plusieurs années. L’apurement des comptes est donc un enjeu crucial pour Jordan Bardella, patron d’un parti aux dettes de 22 millions d’euros. “Nous allons recevoir des dons importants avec nos bons résultats à la présidentielle et aux législatives”, se défend le maire de Beaucaire et vice-président RN Julien Sanchez. Entré en vigueur à l’Assemblée nationale en juin dernier avec 89 députés, le parti devrait toucher plus de dix millions d’euros par an, soit le double de ce qu’il recevait auparavant. Mais l’argent public ne doit pas être versé avant l’été prochain. Pour combler le trou jusque-là, le mouvement a lancé en septembre dernier pour la deuxième fois un “gros emprunt national” auprès de ses membres, espérant lever trois millions d’euros.